L’instant de grâce. Moment d’apesanteur. Quand tout d’un coup, ce n’est plus vous qui agissez, mais que vous êtes agi. Ce n’est plus vous à ce moment là qui tenez le pinceau, le crayon, ou qui êtes l’acteur de l’activité intellectuelle et physique entreprise, qui d’habitude demande des efforts, ou de la persévérance.
Non, tout d’un coup, les choses se font toutes seules. Vous êtes comme spectateur du ‘petit miracle’ qui se produit, et vous avez une sensation de facilité incroyable. Avoir l’impression d’être sur un petit nuage, ou d’être spectateur des choses que vous réalisez, car c’est quand même bien vous qui êtes là en chair et en os, et qui tenez le pinceau, le crayon, qui dansez, qui chantez, qui jouez, qui faites des sauts périlleux…, mais c’est comme si quelqu’un d’autre vous habitait et faisait les choses pour vous, qui vous les susurrait à l’oreille, qui guidait votre crayon ou votre pastel, votre corps avec une justesse jusque là inégalée .
Sensation de dédoublement. Sensation miraculeuse. Sensation d’avoir été visitée par les ‘dieux’. Cela ne dure généralement pas très longtemps, mais quand cet instant survient, vous avez juste eu l’impression de vivre ‘une expérience incroyable’. Quelque chose qui vous dépasse, vous et votre petite carcasse d’être humain. Quelque chose de transcendant, de l’ordre du divin, de façon très ‘païenne’ d’ailleurs. Pas besoin de croire en un dieu pour vivre cette expérience divine, et qui vous fait dire ‘Merci la vie !’.
L’instant de grâce peut aussi se vivre à deux dans une relation. Instant magique, qui peut sceller à vie une relation. Pour ce bref instant d’incandescence vécu ensemble. Quand tout se met en place parfaitement. Quand le rêve prend réalité.
Incandescence. Feu. Coup de foudre. Etrangement, ces instants sont reliés au feu. Le feu qui nous habite. Le feu que l’on peut vivre avec l’autre. Le feu de la création. Le feu créateur, et non pas destructeur.
L’instant de grâce peut aussi être vécu collectivement. L’Ukraine a vécu un instant de grâce dans la nuit de samedi dernier. Quand le dictateur s’est enfui, laissant le champ, je l’espère, à la démocratie. C’est un autre petit miracle quand les peuples réussissent à faire plier bagage à leurs dictateurs…